Né en 1954, vit et travaille à Lasalle. « Devenir peintre… Adolescent, je me rappelle avoir imaginé ça. Un beau rêve mais qui m’apparut finalement assez inaccessible, aussi improbable que l’éventualité de devenir cosmonaute ou président de la république; les artistes, ces magiciens, ces fous, étaient si loin de mon monde et de ma culture. J’étais alors persuadé qu’il me faudrait suivre de longues études aux Beaux-Arts, et que vu mes rapports peu brillants avec l’école, c’était de toute façon fichu d’avance. Pourtant je dessinais, depuis toujours, essayant d’abord vainement d’imiter l’un ou l’autre, jusqu’au jour où j’ai bien senti qu’il fallait seulement m’abandonner à ce trait qui était le mien et laisser l’imaginaire aller à sa guise, sans jugement. Une brèche s’est ouverte et je m’y suis engouffré. Et puis la peinture est arrivée, forcément instinctive, directe, rapide, spontanée. Elle s’inspirait de bande dessinée, d’art primitif, d’art brut et s’est petit à petit imposée sans contraintes, l’essentiel étant de laisser aller la main et de composer au fur et à mesure avec ce qui naissait. Une figuration dont chaque «regardeur» une fois le tableau terminé pouvait avoir sa propre interprétation, raconter sa propre histoire. Je me suis jeté à l’eau sans trop savoir, il a bien fallu que je nage. Après 30 ans d’atelier et d’expositions, le dessin est invariablement à la base de tout. Je ne sais pas si je suis devenu peintre mais la figuration est toujours à l’ordre du jour et l’imaginaire guide encore mon esprit et ma main. La peinture, en perpétuel mouvement, est devenue plus savante, plus réfléchie, plus attentive à la couleur, à ses nuances, à ses transparences, elle m’embarque vers des tonalités sombres, sourdes, aux portes de la nuit, des rêves et de la mort. Ses figures retrouvent aujourd’hui les pauses et les regards des fascinants portraits d’un autre âge, d’un autre monde. » Bernard Le Nen, juin 2015 Regarder la peinture de Bernard Le Nen est un exercice périlleux qui ne peut que venir raviver nos terreurs d’enfance… Bernard Le Nen, le ténébreux, peintre de retables, enlumineur du démoniaque, pourvoyeur de gnomes lippus et de succubes mélancoliques est bien notre contemporain. Il nous entraîne à pas furtifs dans la forêt des origines et des peurs ancestrales … Le bestiaire fantastique que dépeint Bernard Le Nen fait plus que nous cerner, il nous habite…. N’attendez pas de sa peinture qu’elle dissipe vos angoisses, elle les peuple, les hante, elle les fait exsuder de l’inquiétante familiarité de vos propres fantasmes. Bernard Le Nen se situe sur la frange incertaine où se recouvrent les flux et reflux du conscient et de l’inconscient, de l’humanité et de la bestialité, de l’intelligible et du sensible, du rationnel et du fantastique. Et son travail vient à point pour nous rappeler qu’image et magie ne sont qu’un seul et même mot. Extraits d’un texte d’ Alain Bouillet paru dans le no 25 de Création Franche