Né en 1961, vit et travaille près de Tours Seb Russo compte parmi ces artistes dont la peinture se confond avec son histoire. La vie n'a pas été pour lui un long fleuve tranquille. Une enfance passée aux Minguettes, un quartier difficile de la banlieue lyonnaise « qui vous colle à jamais une étiquette dans le dos », puis, à l'âge de quinze ans, un déménagement dans un village de Bourgogne. Là il apprend la solitude, mais cet isolement se révélera fondateur dans son parcours d'artiste. Il découvre au hasard d'un album, le monde fantastique de Philippe Druillet, qui éveille en lui le besoin vital de dessiner tout ce qui l'entoure. Sur concours, il entre à l'école des Beaux-Arts de Lyon. Là, il espère progresser en dessin, « mais on y apprend surtout à être un artiste », se désole-t-il encore aujourd'hui. Il y fait cependant de belles rencontres comme celle de Robert Combas, l'un des pères de la figuration libre. À l'âge de 25 ans, Seb Russo entame une carrière d'ouvrier d'usine, qu'il exercera vingt ans durant. Mais il ne cessera jamais de dessiner, parfois au détriment de son travail, accumulant une impressionnante collection d'œuvres. Aujourd'hui installé à Tours et libre de toute contrainte il peut s'adonner pleinement à sa passion. « On dit de moi que je fais du street art, de l'art singulier, de l'art contemporain, de l'art conceptuel ou que sais-je encore. Pour moi, c'est simplement du rêve et de l'improvisation », observe sobrement celui qui désormais s'est fait un nom parmi les artistes les plus imaginatifs. Quand il jette les premiers coups de pinceaux sur la toile blanche, Seb Russo ignore lui aussi où va l'emmener le dessin. Il reprend volontiers à son compte la phrase de Pablo Picasso : « Si l'on sait exactement ce qu'on va faire, à quoi bon le faire ? ». Dominique Amatulli « J’ai toujours rêvé d’être un héros de bandes dessinées, je voulais marcher sur la lune. Un jour mon papa est arrivé avec une guitare à la maison, il a joué du soir au matin pendant des années, puis il est parti et je n’ai jamais marché sur la lune. Pendant des années, j’ai vu une publicité de Vasarely dans un arrêt de bus, je me suis posé des questions, et j’ai commencé à apprendre le dessin en m’abreuvant d’images. J’ai lu les albums de Philippe Druillet entre les rayons de conserves et le rayon bricolage. Et, comme je ne pouvais toujours pas marcher sur la lune, je me suis inventé un monde en restant accroché à une branche, j’ai dessiné, j’ai peint. Pour moi, cet acte n’est pas un acte simple, c’est un plongeon dans le rêve, une ligne, un trait, un sens, du noir du blanc et un monde prends naissance, avorté parfois, je n’ai jamais rien jeté ! . J’ai travaillé pendant plus de 20 ans dans l’anonymat le plus complet, ne pas avoir le temps de montrer, ne pas pouvoir en parler… Je n’ai jamais regardé derrière moi, je n’ai jamais pensé à l’avenir, j’ai marché sur le présent, je me suis provoqué une indigestion d’images, de rêves et de couleurs. Pour moi l’art n’est rien si il n’est pas partagé.» Sébastien Russo est à l’origine de la revue TRAKT