Née en 1953, vit et travaille à Aurillac. « J’assemble toutes sortes de matières dans des compositions en offrandes à la nature ou dans des reliquaires. Ce sont des sculptures d’assemblage et de modelage ou des bas reliefs. Mes assemblages sont parfois narratifs, avec des thèmes qui me tiennent à cœur comme la naissance, la maternité, l’éclosion, la mort… d’autres fois ils sont plus oniriques, chacun peut y projeter ses propres rêves et visions. J’inclus aussi des insectes et petits animaux séchés, je les relie à mes personnages rêveurs, dans une osmose qui rend hommage au vivant et à tout ce qui fait notre monde. La fragilité des matières m’amène parfois à les protéger sous des globes en verre, le plus souvent d’anciens globes de mariées qui leur donnent une dimension plus sacrée ou bien dans des boîtes vitrées qui laissent apparaître leurs secrets. Le globe apporte aussi une symbolique proche du reliquaire où l’on peut conserver, protéger des choses, reconnaître leur existence. Je m’intéresse à tout ce qui peut témoigner d’un vécu, les objets du passé sont aussi des témoins de vie à travers ceux à qui ils ont appartenu, ils rendent compte de moments de bonheurs ou de traces douloureuses. C’est ce vécu que je récupère. Ces objets ne sont pas en rapport avec la nostalgie du passé mais ils me permettent de refaire vivre des matières vouées à la disparition, de les métamorphoser… Ce travail sur la mémoire des choses, même les plus insignifiantes, me permet de réfléchir sur l’emprise du temps et sur l’harmonie du monde. Mettre le temps en attente, ralentir son rythme pour percevoir la vie. Ce n’est pas la mort que je veux mettre en scène mais la vie. Mes compositions sont vivantes, elles sont dans l’attente de la transformation, de l’éclosion du rêve, comme la chrysalide prépare sa transformation en papillon. Tout renferme une lente vie, même les restes de l’usure, de l’érosion des choses. » Françoise Cuxac est une archéologue obstinée : elle fouille les fissures, elle cherche inlassablement la trace. Elle soulève les petites pierres pour voir ce qui est enseveli. Elle soulève les feuilles. Elle soulève chaque grain de sable. Chaque grain de poussière. Son travail nous parle au plus profond de nous, dans l’ombre de nos vies, dans ce qui a disparu. C’est un hommage au temps qui passe, qui laisse des marques, des cicatrices, des accrocs. Elle glorifie l’usure, met en valeur le terni, le fané. La vie accumulée se déplie doucement, dans un bruissement léger. L’envers du décor redevient l’endroit : l’endroit de nos joies d’enfance, petits Poucets rêveurs ramassant des cailloux plein les poches. L’endroit de nos tout petits riens précieux. L’endroit de nos brisures, meurtrissures, de nos vies cassées en petits morceaux. L’endroit de nos fragments, l’endroit de ce que nous avons enterré. Françoise nous invite à l’intimité de nos inventaires… Véronique Devignon