Guy Bujo né près de Nantes en 1949 s'engage officiellement en peinture en 2010 et expose pour la première fois à la galerie Jamault, à Versailles, après avoir détruit la totalité de ses œuvres antérieures. Autodidacte, il affectionne tout particulièrement les peintres Turner, Pietro Sarto, Balthus, Zao Wou Ki... S'exprimant parallèlement par la figuration et l'abstraction, il poursuit un travail "faussement classique" sans égard pour les tendances éphémères qui jalonnent le marché contemporain, convaincu que le vertige universel présent et à venir ramènera nécessairement bon nombre d'individus au sensible. « Un arbre, une montagne sont-ils datés, démodés? La nature, qui nous ressource tous est-elle arriérée? » Voici une œuvre qui nous parle de présence, dans une écriture à la fois fluide et puissante qui agit comme une inscription hors du temps des hommes. Chaque tableau de Bujo est une peinture d'éternité qui nous incite à l'éveil, nous ramène au souvenir de la splendeur du monde originel. Il est question, dans ce qui se montre là de ce qui féconde en secret l'âme des méditants, celle des voyageurs, mais aussi celle des rêveurs ordinaires que nous sommes. Ici s'opèrent la lutte et l'accouplement des ombres et des lumières : Et quelle lumière! Celle-là même qui nous parle, par paysages interposés, de nos jours et de nos nuits intérieurs : Contre-jours puissants ou brumes laiteuses, crêtes et frondaisons caressées de l'or du couchant se prêtent au kaléidoscope des sentiments. Le peintre ne travaille jamais sur le motif ni ne se réfère à une quelconque aide documentaire, il dit "porter en lui" les perspectives changeantes qu'il nous offre... Il est à noter que l'artiste se présente comme un "peintre par défaut", lui qui fut enseignant, s'adonna à la critique littéraire et à la critique d'art, pratique le dessin, la poésie, ou encore la photographie. Mais c'est à la musique, cette "plus haute expression du désir d'absolu", qu'il voue une admiration sans nuance ; il évoque comme une "forme en creux" ce langage qu'il ne pratique pas mais qui lui est essentiel : « La musique et la danse, sa complice, ont le pouvoir de m'appréhender, me porter, me bouleverser, avant de disparaître : Elles ont à notre image. Je m'efforce de faire en sorte que ma peinture ait sa propre musique intérieure, sa propre chorégraphie. » Point de gesticulations plastiques gratuites ni d'enflement de l'ego chez ce peintre, on l'aura donc compris, pas de considération non plus pour le galop effréné de l'actualité et du marché : Bujo se nourrit du privilège de celles et ceux qui, ayant appris à ouvrir leurs ailes, fréquentent - loin des détracteurs opportunistes – les hauteurs sur lesquelles le temps n'a pas de prise. Gageons que tous les amoureux d'un art sensible se retrouveront dans ce nouveau chant du monde et cette remontée quasi sacrée vers la source d'où tout s'origine. Charles Destrans