Lajameux

Lajameux

Née en 1940, vit et travaille à Marseille Danielle Jameux dite «Lajameux» peint, dessine, malaxe la terre et depuis peu s’essaie à la gravure. Elle veut tout essayer. Infatigable, sans y prendre garde, elle se nourrit de tout, bâtit des histoires basées sur son vécu, son enfance, ses rencontres. Elle marche sur les chemins, dans les forêts, dans ses pensées, dans ses rêves. Ses chemins de traverses sont sensibles, douloureux, ludiques ; son voyage intérieur est interminable. Elle s’imprègne de nature, forge ses souvenirs, se laisse envahir, porter par les sensations. Elle enfouit les mots au plus profond d’elle-même…, ces mots qu’elle emprisonne dans ses pensées. Puis, elle franchit la ligne. En côtoyant l’indicible, l’invisible, les mots sensibles arrivent sur la toile. Elle invente un monde imaginaire qui est le sien. Elle raconte des histoires, des contes, des légendes, crée sa propre écriture. Les personnages présents-absents naissent à son insu, se bousculent, jouent, s’interrogent ? La couleur explose. «Entre la Bonne mère, le port de Marseille, les calanques et les montagnes, depuis mon tout jeune âge, je trafique le long d’un parcours artistique solitaire.» confie-t-elle. La Dépêche du Midi Lajameux n’expose que depuis 2004, année où elle a accepté de montrer son travail pour la première fois à Aubagne pendant le festival d’Art Singulier de Danièle Jacqui. L’œuvre de « Lajameux, le « la » pour mieux affirmer son empreinte féminine dans un milieu familial où elle a grandi, presque exclusivement masculin, raconte avec des craies, des crayons, des pinceaux et des encres, des histoires que la couleur assombrit, habille de sa dramaturgie… Des personnages en mouvement, hommes et femmes, parfois hybrides, traversent grimés des espaces ouverts ou fermés, formant parfois farandoles et processions ou offrant visages et regards évasifs, comme prisonniers de leurs propres pensées. Tous les singuliers ne font pas de l’art « heureux ». Avec ses teintes sourdes, on ressent chez Lajameux comme le poids d’une profonde tristesse, de souvenirs douloureux, de paradis perdus... Les mises en scènes se font autour de sujets récurrents et symboliques, comme les fonds marins ou les forêts. Des humains s’attirent ou se quittent, apparaissent ou disparaissent, des myriades de poissons passent et se faufilent, comme pour interrompre ces silences abyssaux, offrant au passage, la lumière de leurs belles écailles. Si au fond de la mer, la vie semble suivre son chemin et l’eau offrir sa protection maternante, la forêt surprend celui qui s’y aventure. En son intérieur les éléments, hommes et arbres se confondent. Si la forêt incarne dans une certaine philosophie le refuge des âmes perdues, elle est aussi à l’origine, depuis la nuit des temps, le terrain d’histoires des plus sordides et peut devenir le terrain d’angoisses ou de visions dérangeantes… Sylvie Vilette, Istres