Née en 1946. Vit et travaille au Poiré-sur-Vie (85) Catherine Sani est née à Saint-Germain-en-Laye d’un père journaliste et d’une mère institutrice. Après une scolarité chaotique, elle pratique la photographie et exerce divers métiers dans l’audio-visuel. C’est en 1989, au cours d’une maladie qui l’immobilise, qu’elle commence à réaliser une série de tableaux en tissu. C’est alors le début d’une œuvre fantasmagorique peuplée d’objets et de créatures bizarres qui naît sous les doigts de cette artiste remplie d’une énergie frénétique. Ce monde grouille et fourmille, à l’instar de sa créatrice. Après avoir découvert une pâte qui durcit en séchant, elle modèle des petits personnages qu’elle installe dans des habitacles décorés. Mais elle peint aussi à l’acrylique sur des supports hétéroclites : portes de placards, des planches à découper… Pendant dix ans, pour des raisons professionnelles, elle a dû ralentir ses activités de création. Retraitée depuis 2007, elle a retrouvé une envie de créer intacte et débordante. « La Petite Personne nous regarde : visage expressif, allure pataude, arlequin de pacotille. Pieds palmés et paumes tendues. Parlons aussi de ses attributs, sexe démesuré, seins énormes. Forcément dérisoire et ludique, humour ou obsession ? A chaque Petite Personne correspond un habitacle fait de bric et de broc, des bouts de n’importe quoi glanés dans l’atelier. Rebuts, objets de rien bientôt s’agencent, alors d’un coup la Petite Personne prend vie et nous regarde ». Catherine Sani Ignorante des règles, provocatrice, animée, agitée dirait-on plutôt, d’une curiosité déplacée par rapport aux bons usages, avec de singulières façons d’aimer farouchement et de le faire savoir, avec d’insupportables élans vers la sincérité, avec la révélation d’un univers préservé de toute banalité, une force vitale qui balaie l’indifférence, au risque de forcer à l’irritation. Riche nature que celle-là qui nous dérange, déplace notre regard de ses acquis sécurisants et veut, ce qui s’appelle vouloir, nous faire entrer dans ce domaine, créé dans son principe par un mystérieux et peut-être imperceptible big-bang, se développant à la vitesse expansionnelle des galaxies boutées hors les sentiers battus par une énergie qui, généralement, osons une image hardie, ne s’use que si l’on ne s’en sert pas. Cette litote nous ramène aux dimensions humaines de ce genre d’aventures. Catherine Sani il n’en faut pas douter, est une femme. De toutes ses forces ; de tous ses désirs… Elle est bel et bien folle celle-là et tient à le faire savoir. Sans doute fit-elle sienne la maxime d’Henri Michaux : « Qui cache son fou meurt sans parler ». Et elle parle, elle parle ; et elle vit. Avec une évidence, une conviction, qui laissent pantois les partisans fanatiques du rien à voir. Elle donne à voir. Beaucoup. Partout. Sur le papier, la toile, dans les tapisseries, les petites boîtes, les minuscules sculptures. Tout ce qui fourmille, grouille, tripatouille, en une profusion de formes offertes à nos envies. Catherine Sani existe frénétiquement si l’on se souvient que cela veut dire de façon délirante et passionnée. Baudelaire parlait de la passion frénétique de l’art. Déjà. Encore. Ainsi apparait-il que l’art, sincère et authentique, a toujours existé pour les plus originaux esprits, comme synonyme de passion. Catherine Sani ne ferait donc qu’entretenir la tradition. Si cette vérité fut de tous les temps, nous ne pouvons que mieux nous y reconnaître. A condition d’ouvrir l’œil. Grand. Et puissent les créatures surgies en ces genèses nous le tenir écarquillé. Gérard Sendrey Extraits d’un texte pour la Création Franche – novembre 1992