Né en 1967, passe son enfance au Pouliguen. Après une scolarité des plus médiocres, il entre aux Beaux Arts de Nantes et en ressort quelques mois plus tard. Dès lors, il s’enferme dans une vieille maison nantaise prêtée par sa grand-mère. C’est là que son univers prendra naissance. Chaque nuit, il dessine dans une grande exaltation. Très solitaire, il ne fréquente pas le milieu artistique local et ne montre jamais ses dessins. Après quelques années en Bretagne, il s’installe à Paris où il rencontre l’œuvre de Louis Pons et la galeriste Béatrice Soulié qui lui organise sa première exposition. Soren invente me semble-t-il, une géographie de l’obscur, du chagrin. L’ombre n’est pas pour Soren un moment ou un élément du monde visible. Elle est substance originelle, elle est son miroir le plus intime. En la travaillant dans son épaisseur, sa densité (au fusain, à la pierre noire), il accouche d’une étrange lumière. Une lumière intérieure, vivante, douloureuse. Les ténèbres se sentent avec la peau. Soren malaxe lumière et ombre, les triture avec ses doigts, tel un étrange démiurge, obscur à lui-même. En lui cuvent depuis si longtemps les êtres de ses cauchemars, les douleurs silencieuses, et tous ces songes troubles, comme des blessures dont on ne peut pas guérir. Ainsi ses dessins sont comme ses enfants, ses doubles, d’insistants fantômes. Soren compose ses espaces (la composition, l’équilibre de l’image l’obsèdent) en luttant avec la matière, la travaillant au fusain, à la pierre noire : « je cherche aussi, dit-il, la matière, dans l’ombre comme dans la lumière, et je frotte, je gratte, j’arrache le papier à la lame de cutter, mon geste est proche de celui d’un artisan qui poncerait son objet, le patinerait avec tendresse ». Des entrailles de cette matière, il accouche des corps que si souvent la langue dit monstrueux ; souvent ce sont des restes, blessés, archaïques, de vies oubliées (éléphants, rhinocéros, tortues géantes ou encore d’étranges pantins). L’ombre subtile que Soren secrète les fait éclore soit dans des lieux sans bords, dans une lumière blessée de monde larvaire, soit dans des fragments d’architectures monumentales. De toute manière, Soren nous entraîne au bord du monde, vers des territoires dont nous ne savons pas les noms…. Extraits d’un texte écrit par Jean-Michel Maubert pour le no 11 de l’œuf sauvage, automne 2012